L’hymne national finlandais, sur une musique de Fredrik Pacius et des paroles de Johan Ludvig Runeberg, a été entonné pour la première fois en 1848 par des étudiants célébrant « le Jour de la Flore » (le 13 mai) dans un pré situé sur les terres du manoir de Gumtakt (Kumtähti en finnois) à Helsinki.
J.L. Runeberg, directeur du Borgå Lyceum à Porvoo, avait écrit deux ans plus tôt le texte original en suédois intitulé Vårt land (« Notre pays »). Le poème avait été publié à l’automne 1846 en guise de prologue à l’œuvre de Runeberg Fänrik Ståls sägner (« Les Contes du porte-drapeau Stål »), un recueil de 35 ballades héroïques se déroulant au cours de la Guerre de Finlande en 1808-1809 ; suite à cette guerre, la Suède dut céder la Finlande à la Russie en vertu du Traité de Hamina signé en 1809.
L’idée de Runeberg en écrivant son épopée était de faire vibrer le sentiment patriotique finlandais. Il semble qu’il se soit inspiré pour écrire Vårt land du « Szózat « de Mihaly Vörösmarty, l’hymne national hongrois publié en 1836. Jusque dans le courant du vingtième siècle, les Finlandais ont été fortement influencés par l’idéalisme politique des « Contes du porte-drapeau Stål » et de Vårt land : c’est ce qui explique que Runeberg ait rapidement été élevé au rang de poète national.
Runeberg était un nationaliste conservateur et modéré, fidèle aux pouvoirs en place. Les autorités étaient surtout soucieuses d’empêcher l’émergence d’idées radicales ; l’esprit révolutionnaire de la Marseillaise trouvait à l’époque un certain écho en Finlande. Vårt land contribua à apaiser les pulsions patriotiques des étudiants, et le bain de sang vécu dans d’autres coins de l’Europe put être évité en Finlande.
Si plusieurs compositeurs avaient déjà essayé de mettre en musique le poème exalté de Runeberg avant Fredrik Pacius, c’est pourtant la version de ce compositeur d’origine allemande et professeur de musique à l’Université d’Helsinki qui obtint les faveurs du public. C’est le compositeur lui-même qui a dirigé le chœur de l’Université lors d’une première interprétation lente et majestueuse, andante maestoso, qui a ému aux larmes le public qui y assistait. La musique de Pacius a ensuite été également reprise pour Mu isamaa (« Mon pays »), l’hymne national estonien de 1918 à 1940, puis à nouveau depuis 1990.
Les historiens se plaisent à dire que la Finlande est née le Jour de la Flore, le 13 mai 1848. Fredrik Cygnaeus, président de l’organisation étudiante, prononça le principal discours de la célébration, concluant par le toast : « A la Finlande ! ». L’organisation étudiante était dotée d’un fanion représentant un lion à couronne de lauriers sur champ blanc, spécialement réalisé pour la célébration. On peut dire qu’il s’est agi du premier drapeau finlandais. A la fin, l’assistance forte de quelques centaines de personnes entonna Vårt land avec une ferveur joyeuse. Pour la première fois, l’idée d’une identité nationale finlandaise particulière était mise en exergue.
Vårt land s’est rapidement imposé comme expression du sentiment patriotique, surtout après la publication de l’élégante traduction en finnois de Paavo Cajander (Maamme) vers la fin du 19ème siècle.
Ecouter :
« Maamme » (YLE Elävä arkisto)