Chaque geste que vous faites laisse des traces numériques de votre passage. Votre historique de navigation et vos publications sur les réseaux sociaux créent ainsi des données vous concernant, alors que vous ignorez totalement la plupart de ces informations, ou qu’elles sont totalement hors de votre contrôle.
La Conférence MyData s’inscrit dans un mouvement d’apparition récente dont la démarche vise à vous permettre de contrôler vos données. La quatrième édition annuelle de cet événement aura lieu à Helsinki du 25 au 27 septembre 2019.
« MyData est un mouvement à dimension à la fois technique, économique et juridique ayant pour objectif de permettre aux utilisateurs de s’approprier et de contrôler leurs propres données », nous explique Molly Schwartz, journaliste spécialisée technologies basée à New York et animatrice de la Conférence MyData. « Il y a des problèmes manifestes et des abus à grande échelle en matière de données personnelles. »
L’UE a établi un certain nombre de règles dans ce domaine, notamment le Règlement général sur la protection des données (RGPD) pour les données privées individuelles ; cependant, la plupart des données générées dans le monde ne sont régies par aucune norme technique ni éthique quant à la manière dont elles sont utilisées. MyData espère résoudre ce défi.
MyData n’est en rien un organisme, mais un terme générique recouvrant de nombreux projets et initiatives de gestion de données axés sur l’individu. Etroitement lié à l’Open Knowledge Foundation, le mouvement MyData prône le recours aux formats de données ouverts, parfois également appelés formats libres. Le réseau MyData dispose de hubs locaux sur tous les continents, exception faite de l’Antarctique, étant précisé que MyData entretient des liens particulièrement étroits avec la Finlande.
Un solide enracinement finlandais
« Je suis venue en Finlande en tant que boursière Fulbright pour travailler au Media Lab de l’Université Aalto », précise Schwartz. « En 2015, j’ai assisté à une conférence sur le militantisme numérique au cours de laquelle quelqu’un a évoqué le concept MyData. Nous étions alors dans les premiers mois de la mise en application du GDPR et les GAFA étaient encore relativement peu sous le feu des critiques par rapport à aujourd’hui, aussi j’ai eu envie d’en savoir plus sur les solutions disponibles en matière de protection des données. »
Le développement du réseau local finlandais MyData s’est accentué à la suite d’une étude de 2014 commandée par le ministère finlandais des Transports et des Communications. Tandis que l’expansion du mouvement se poursuit toujours à l’heure actuelle en Finlande, la dynamique MyData a généré cet événement majeur qu’est aujourd’hui la Conférence annuelle MyData qui se tient à Helsinki, avec également quelques réunions ayant pour cadre la ville voisine de Tallinn, en Estonie, qu’un bras de mer de la Baltique sépare de la capitale finlandaise. Les sujets abordés vont des aspects techniques de la portabilité des données aux plateformes numériques de type data marketplaces.
« La Finlande est un endroit propice au développement de ce mouvement général », estime Schwartz. « La Finlande s’inscrit dans la perspective européenne de la protection des consommateurs. La Finlande est aussi un pays dont la culture est fondamentalement axée sur la recherche de solutions et qui compte d’excellents ingénieurs informatiques, sans compter que c’est aussi un petit pays : vous pouvez donc y mener un projet pilote couvrant de nombreux secteurs de la société. »
Qu’attendons-nous des technologies ?
Minna Saariketo est doctorante en études des médias à l’Université de Tampere. Ses recherches sur les conditions dans lesquelles les particuliers utilisent les technologies numériques et la perception qu’ils en ont l’ont amenée à s’intéresser de plus près à MyData.
« Des géants comme Google et Facebook ont une influence considérable sur notre vie quotidienne », dit-elle. « En règle générale, les gens acceptent l’idée qu’ils utilisent ces services en perdant leurs données au passage. MyData offre dans ces conditions une alternative, une véritable refondation du système sur des bases nouvelles. »
La plupart des participants aux conférences MyData sont des experts économiques, juridiques ou techniques. Saariketo a pu leur expliquer comment le grand public utilisait les technologies de l’information et quel regard il portait sur les données.
« MyData travaille avec des gouvernements et des développeurs, mais le réseau doit impérativement toucher tout aussi bien les gens ordinaires », affirme-t-elle. « Les technologies numériques en réseau font partie intégrante de notre existence au quotidien, c’est-à-dire de l’instant même où nous nous levons jusqu’à l’heure où nous allons nous coucher. L’un des objectifs majeurs de mon travail est de fournir des indications sur les possibilités de décliner notre système différemment. Nous voulons que les gens prennent du recul pour réfléchir à ce qu’ils attendent des technologies. »
Prendre l’initiative par rapport à ses données
Les technologies nous fournissent des services précieux, mais elles ont un coût : celui-ci n’est d’ailleurs pas seulement monétaire, puisque nos données en sont elles aussi l’enjeu. Même si le mouvement MyData a encore beaucoup de chemin à parcourir, tout particulier est aujourd’hui en mesure de prendre des initiatives personnelles pour se tenir informé des évolutions en cours et protéger ses données.
« J’espère que les gens continueront à se tenir au courant et à manifester de l’intérêt au sort qui est réservé à leurs données et aux évolutions technologiques », ajoute Schwartz. « Lisez les informations qui sortent sur les violations de la confidentialité et choisissez des services qui affichent de meilleures références. Suivez l’actualité de sites comme Data Ethics et Personal Data. Il existe également des outils ayant vocation à contribuer à assurer votre sécurité, par exemple les réseaux privés virtuels. »
Les principes sur lesquels repose MyData
1) Les individus doivent pouvoir exercer un droit de contrôle sur leurs données et ont droit à la protection de celles-ci 2) Les données se doivent d’être d’un accès technique facile et pouvoir s’utiliser dans des formats standardisés 3) Le modèle qui est prôné est celui d’un environnement de travail ouvert doté d’infrastructures partagées et d’un mode de gestion décentralisé |
Par David J. Cord, septembre 2019